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Thursday, December 05, 2019

Un bèl raconte (Une belle histoire)

(source: Page Quora de Xavier Fiorido)
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Parlez-vous l'occitan ?

(repond Xavier Fiorido)

Plutôt que de répondre simplement "Oui" je préfère vous raconter comment j'en suis arrivé là, voire un peu plus…

Je suis né en Occitanie près de Toulouse et passais toutes les vacances d'été chez mes grands-parents.

C'était une ferme sur une mer de collines avec les Pyrénées en toile de fond, je n'oublierais jamais les blés dansant au soleil couchant.

Mes grands-parents vivaient avec mon arrière-grand mère maternelle et parlaient occitan entre eux.

Étant petit je ne comprenais pas quel était ce langage que j'ai même pris pour de l'anglais (!) au grand rire de tous.

Toujours est-il que sa chaude musique déclenchait en moi un profond et indescriptible bien-être.

En dehors du cercle des gens de leur âge mes grand-parents ne parlaient pas la Lenga.

Pourquoi ?

Ils en avaient honte - la vergogna - comme on dit.

Car en leur enfance "l'école de la République" les a soigneusement punis quand ils parlaient leur langue maternelle, en l’occurrence l'occitan languedocien.

Toutes les langues dites régionales ont subi le même linguicide méthodique et institutionnalisé.

Dès lors ils ne l'ont pas enseigné à la génération de mes parents qui de fait ne la parlaient pas du tout.

Que dire de ma génération ? (je suis né en 1984)

Res !

Nada.

Rien.

Triste sentiment d'une belle culture étouffée.

Chaleureux souvenirs d'Anciens parlant et remuant de leur accent rocailleux des siècles d'Histoire.

Pour certaines raisons je n'ai quasiment plus eu de contacts avec ma famille dès l'âge de 18 ans.

Inutile dès lors d'envisager une éventuelle transmission de la part de mes grands-parents.

J'avais ma vie a construire, le temps est passé mais j'avais toujours en moi cette amertume, celle de ne pas connaître et transmettre la langue que j'aimais.

Je me suis donc dit que peu importe, j'allais faire mon possible pour m'en rapprocher.

J'ai donc commencé par écouter de la musique contemporaine occitane : quelles heureuses retrouvailles que ces sonorités de mon enfance et de mes aïeux !

Je me suis appliqué à déchiffrer, comprendre et apprendre chaque jour un peu plus.

Bizarrement je n'osais pas "sortir du bois" et gardais cela secret, comme si cette triste vergogna m'avais été transmise…

Puis j'ai franchi le pas, j'ai suivi des cours durant quelques mois à l'Institut d'Estudis Occitana de Toulouse puis ayant dû déménager j'ai poursuivi avec l'excellente appli Assimil Occitan.

(Je n'ai aucun intérêt à en faire la promotion si ce n'est que je l'ai trouvé efficace et souhaite partager cela. Je retirerais cette mention si elle apparaît inappropriée)

Peu à peu je me suis surpris à penser en Occitan, sentiment étrange car j'avais la sensation de me connecter à tous les locuteurs m'ayant précédés, et Dieu sait s'il y en a eu !

A l'enterrement de mon grand-père j'ai préparé puis lu une homélie en occitan et français devant toute l'assemblée, autant dire qu'on était nombreux à en avoir les larmes aux yeux.

Puis au mois d'avril alors que j'étais à Clermont-Ferrand je vois une pub pour une soirée "Café-occitan".

L'Auvergnat est légèrement différent du Languedocien mais qu'importe, la base est la même.

Et là surprise… j'ai débité tout naturellement durant près de 2 heures !

Si bien qu'à la fin on m'a demandé depuis quand je parlais.

"Et si je te dis que c'est la première fois que je parle aussi longtemps ?"

Je suis tellement heureux, humblement fier et satisfait de pouvoir faire vivre et transmettre cette langue millénaire.

Donc pour répondre à ta question…

Oc, parli Occitan !

Oui, je parle Occitan !

Allez…

Adieu-siatz brave monde !

Que Dieu vous garde, braves gens !





(Le Parnasse des Lettres)

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